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Re: Sabre yatagan de l'Empire Ottoman : une création de Bernard Delor, coutelier d'art

MessagePosté: Mer 1 Déc 2010 15:10
de Shimegi
Si tu passes par de la fonte "bijouterie", tu peux affiner les épaisseurs : un bon fondeur saura avoir un résultat pour des épaisseur allant jusqu'à 4/10èmes de mm, et je dirais qu'au dessus de 8/10emes tu ne devrais pas rencontrer de problèmes liés à la qualité du métal. Cela étant, je parle pour des alliages type argent/or et laiton ; je ne connais pas le bronze mais le fait que ça soit proche du laiton dans la composition de l'alliage me fait dire que tu dois pouvoir faire un peu plus fin, mais mon avis ne vaut que pour un type de fonte particulier, je ne suis pas certain qu'un fondeur d'art qui fasse du bronze utilise le même matériel qu'un fondeur pour la bijouterie-joaillerie.
Il faut par contre éviter les angles qui vont créer des points froids et augmenter le risque de porosité dans la fonte, donc en plaçant les tiges de coulée, il faut penser à alimenter en plusieurs endroit si la géométrie présente des étranglements et/ou des angles importants.

Concernant le rétreint, on compte en général 1.5%, mais c'est très variable selon la géométrie de la pièce, du fondeur, du revêtement, et du temps qu'il fait (façon de dire qu'à alliage, fondeur et revêtement constant, le rétreint varie toujours, mais ça reste négligeable au regard des épaisseurs enlevées lors de la reprise du métal). Il vaut mieux donc considérer ce 1.5% et ensuite ajouter des marges, selon la géométrie, pour prévoir la reprise : 1/10ème supplémentaire pour une zone un peu bombée, un peu plus sur des zones planes (on a toujours tendance à attaquer plus vite le plat).

Concernant l'état de surface : je pense qu'il faut toujours privilégier un état de surface réalisé sur la fonte et non sur la cire. D'abord parce que tout accident de fonte entraînerait une reprise qui dénaturerait un état de surface fait sur la cire, et serait quasiment impossible à refaire à l'identique sur le métal à cause des différences de matières et d'outils. Ensuite parce que le ressenti d'un état de surface sur la cire et sur le métal est tout à fait différent, et il n'est pas certain que ce qui est satisfaisant pour l'un l'est également pour l'autre. Enfin parce que la qualité du revêtement est important dans la conservation du détail, et crée de lui-même un état de surface qui n'est contrôlé, dans une certaine mesure, que par le fondeur.

Petit truc pour faire une épaisseur constant sur une pièce en cire : la travailler en transparence au dessus d'un éclairage fort (mais pas trop chaud).

Par contre je suis étonné que le budget ait un impact si important sur le choix de l'argent : le prix est grosso modo le même que pour du laiton ou du cuivre.

Re: Sabre yatagan de l'Empire Ottoman : une création de Bernard Delor, coutelier d'art

MessagePosté: Mer 1 Déc 2010 16:28
de BDelor
Merci beaucoup pour cette réponse très détaillée qui me rassure quant aux épaisseurs et aux risques de retrait. Merci aussi pour le "truc" du travail en transparence, c'est très astucieux !
Il faudra voir avec le fondeur si la technique employée est celle de la fonte bijouterie. Pour ce que j'ai eu l'occasion de voir, ce type de pièces d'ornement pour la coutellerie fait habituellement l'objet de fonte dans une enceinte sous vide de manière à améliorer la diffusion du métal grâce à la porosité du moule. Je ne sais pas si cette méthode est spécifique ou si c'est une pratique générale.

Je prends bonne note pour les finitions. Je travaillerai directement sur la pièce finale pour l'aspect des fonds, et peut-être aussi des effets de brunissage ou de polissage... à voir le moment venu.

Concernant le prix de la matière, je m'étais basé sur le cours du Kg d'argent (environ 650 à 700 euros), bien plus que le bronze ou le laiton. D'après ce que tu dis, je dois avoir faux quelque part...

Pour la réalisation de cette partie du projet, j'ai demandé à Roseleur de bien vouloir me donner un coup de main en voisin (Marseille - Nice...), et on ne devrait pas tarder à entrer dans le vif du sujet.
Encore merci à toi et surtout, n'hésite pas à intervenir à nouveau.

Re: Sabre yatagan de l'Empire Ottoman : une création de Bernard Delor, coutelier d'art

MessagePosté: Mer 1 Déc 2010 16:51
de Shimegi
Non c'est à peu près ça, je crois que c'est plus près de 600 que de 700 en ce moment mais l'argent est assez léger (10.5) et de meilleure tenue à la fonte. Après, c'est toujours une question de références. Je travaille en grammes et avec des métaux beaucoup plus chers, donc argent (6€/g) et laiton (2.5€/g) : même combat. La différence est au final de quelques euros, négligeables par rapport à la main d'œuvre ou en rapport à l'or (10 fois le prix de l'argent aujourd'hui, pour le même volume). L'argent se comportant mieux que le laiton pour le travail (ok, c'est aussi une question de goût), la différence est absorbée dans le temps de travail épargné.

La fonte sous vide est une technique assez performante, même si aujourd'hui on voit plutôt de la fonte sous pression de gaz neutre.

Re: Sabre yatagan de l'Empire Ottoman : une création de Bernard Delor, coutelier d'art

MessagePosté: Mer 1 Déc 2010 22:02
de roseleur
J'ai conseillé une épaisseur un peu plus importante à Bernard en raison de la dimension de la pièce. Par expérience, je sais que les pièces fines, relativement longues et larges ont du mal a sortir.

Autre point important : le montage sur la lame acier.
La flexibilité de l'ornement empêcherait une bonne adhérence en cas de rivetage et pour la soudure sur la masse d'acier, cette finesse serait également une grosse difficulté.

Re: Sabre yatagan de l'Empire Ottoman : une création de Bernard Delor, coutelier d'art

MessagePosté: Jeu 2 Déc 2010 11:51
de Shimegi
Personnellement la dimension ne me parait pas excessive. Si j'avais à le faire, à chaud, je partirais sur une épaisseur finie en argent de 18 ou 20 (en dixièmes) qui me parait un bon compromis pour avoir une bonne qualité de fonte, un poids raisonnable, et quelque chose d'assez résistant sans l'être trop. Effectivement si c'est brasé (ou soudé ? je ne sais pas si c'est faisable entre l'acier et l'argent ?), ça peut poser quelques difficultés.

Après il faut évidemment pondérer mes avis et conseils par le fait que je ne connais bien ni le bronze ni l'acier. Ni la coutellerie d'ailleurs. Je les donne donc avec beaucoup d'humilité, et je suis très curieux de connaître les choix qui seront faits, et le résultat obtenu !

Re: Sabre yatagan de l'Empire Ottoman : une création de Bernard Delor, coutelier d'art

MessagePosté: Ven 3 Déc 2010 12:44
de AchimW
Juste un petit mot sur le prix de l'argent. Le prix de bourse au kilogramme aujourd'hui (3 decembre 2010) est de 700 Euros. Mais ce n'est pas le prix de vente. Quand c'est un métal industriel, il ne faut pas seulement calculer une certaine marge pour les marchands entre la bourse et celui qui veut utiliser, mais aussi la TVA en plus. En allemagne, le kilo sous forme de barreau ou de granailles pour fondre vaut environ 890 Euros aujourd'hui avec une tendance de devenir plus cher.

C'est le prix chez les grands vendeurs. Les petits quantités et du métal déjà travaillé sous forme de plaques, barreaux, tubes ou grenailles chez les revendeurs spécialisées pour la bijouterie (comme par exemple zujeddeloh.de ), c'est environ le double.

Re: Sabre yatagan de l'Empire Ottoman : une création de Bernard Delor, coutelier d'art

MessagePosté: Lun 6 Déc 2010 22:11
de ti serge
Comme tout le monde, je suis avec intérêt l'avancement de ton travail que tu mènes en professionnel. Bravo !
Projet dont, je me souviens, tu m' avais parlé à Thiers.

Les pièces fines en argent viennent très bien à la fonte , c'est une question de jets d'alimentation ; de toute façon, c'est ton fondeur qui sera le meilleur conseiller.
Si l'argent et l' acier se soudent très bien entre eux, à mon avis ce n'est pas une solution, les deux métaux ne prendront pas la température en même temps, l'argent risque d'être fondu avant que l'acier soit rouge, et pour la trempe ça posera des problèmes. Tu pourrais assembler tes motifs avec des rivets en argent faits dans les jets d'alimentation que ton fondeur pourra te donner. L'argent étant mou, tu n'auras pas à matter fort, donc pas de déformation des tes motifs.
Quelquefois, il est bon de prendre le moulage des cires, ne serait-ce que pour les avoir en référence.
Les conseils, il est toujours facile d'en donner ! C'est toi le patron !

Quant à Shimegi, je ne sais pas où il achète son laiton, mais 2,5 euros le g : ça me semble plus que hors de prix !

Re: Sabre yatagan de l'Empire Ottoman : une création de Bernard Delor, coutelier d'art

MessagePosté: Lun 6 Déc 2010 22:50
de BDelor
Merci de ton message, je suis sincèrement touché, et pour le moins flatté de ton intérêt !
Je réfléchis à cette question depuis un bout de temps et j'en suis arrivé aux mêmes conclusions. Roseleur, à qui j'ai demandé conseil car je ne me sens pas à la hauteur pour le travail de brasure, n'est pas très chaud non plus pour la soudure sur la lame. Le rivetage avec des jets d'argent me semble la bonne solution, mais il y a quand même deux points délicats :
  • il faut trouver dans le motif des emplacements suffisamment larges pour poser les rivets, et qui coïncident bien des deux côtés. Quand j'ai fait les cires, je suis parti du même modèle mais je ne me suis pas spécialement préoccupé de le positionner strictement à l'identique sur les deux plaques. Il faut donc maintenant que je les relève exactement et que je les superpose pour voir si tout est bien en place !
  • j'ai quelques inquiétudes quant à la tenue des rivets en cas de flexion de la lame qui reste volontairement fine à ce niveau (3,5 mm) pour ne pas avoir une base trop épaisse, ce qui serait à la fois lourd et disgracieux. Ça veut dire que les ornements contribue dans une certaine mesure à la rigidité de la lame. Il ne faudrait pas que les rivets argent, forcément malléables, risquent de sauter. Je pense soit à un rivetage + collage en multipliant les rivets, soit à un simple rivetage mais avec une matière moins malléable (ornements et rivets en bronze) ce qui conduirait à faire ensuite une épargne sur la lame et un placage argent.

Les lames d'époque sont toujours passablement encrassées, et il est difficile de voir clairement comment est fait le montage. Ce qui est sûr, c'est que le rivetage est souvent visible. Par contre, les plaques, parfois très fines (métal repoussé) sont parfaitement jointives sur la lame, parfois avec des sertissages de pierres, j'ai donc tendance à penser qu'il devrait y avoir utilisation d'une sorte de colle ou d'enduit....

Le moulage des cires est prévu avec Roseleur, on n'est jamais trop prudent ! Quant aux conseils, il ne faut pas te gêner, ils sont toujours bons à prendre et je t'en remercie !

Re: Sabre yatagan de l'Empire Ottoman : une création de Bernard Delor, coutelier d'art

MessagePosté: Mar 7 Déc 2010 00:08
de ti serge
Je doute fort qu'à l' époque, les colles sur les métaux étaient résistantes.
Les rivets, c'est plus solide que l'on ne le pense, il suffit de multiplier leur nombre (regarde la tour Eiffel !)
Pour les rivets, tu peux rajouter du cuivre à l'argent pour en augmenter la résistance.

Re: Sabre yatagan de l'Empire Ottoman : une création de Bernard Delor, coutelier d'art

MessagePosté: Mar 7 Déc 2010 09:57
de AchimW
J'utilise très souvent des rivets en argent sterling (925/1000) et ils sont extrèmement résistante et tenace.

En ce qui concerne les colles, il ne faut pas se tromper de la résistance des colles naturelles. Il y en a qui sont très fort. Pas assez pour coller les ailes d'un A380 mais pour un manche de sabre, c'est plus que suffisamment. Il y a bon nombre de sabres type tulwar qui ont des soies courtes qui sont collés dans des manches en tôle (de wootz dans certains cas!).