Jean Seydel, maître Jean - forgeron à Uccle (Bruxelles)

[brindacier]

Je lui ai connu une très belle arbalète à moufle (c'est un système d'armement à poulies) mais dont l'arc était très souple ; c'était pour les fêtes médiévales.
J'ai beau chercher, je ne trouve hélas pas de photo d'elle.

[Metal Connexion]

Gargouille me glissai en a parte :
Jean Seydel était beaucoup plus qu'un homme : un personnage !
Il avait appris l'italien quand il s'est lancé dans la fabrication de pochettes et violons, pour découvrir le secret du vernis de Stradivarius.
Il parlait japonais avec son apprenti Tagada. [langue qu'il a apprise dans les livres avant de se rendre à l’Exposition Universelle de Tokyo, me dira-t-on plus tard.]
Son atelier fut ouvert à tous, souvent jusqu'à l'aube. Et on retrouvait à sa table des antiquaires, des restaurateurs, des facteurs de clavecins ou de flûtes baroques [...]

Et Viktor de surenchérir :
[...] à la table de Jean Seydel, outre les facteurs de clavecin et autres antiquaires, il y avait également un coq, une multitude de chats (pas de chien), quelques poules et un cheval. Tout ce beau monde était en parfaite liberté et se promenait à sa guise dans le moulin. Seuls les lapins étaient prisonniers d’un enclos scindé en deux parties pour d’évidentes raisons de croissance anarchique de la population.
Quant aux escargots, les filles de Jean les rentraient dans la cuisine lorsqu’il pleuvait, histoire que ces pauvres bêtes n'attrapent pas un rhume.
Pour résumer, le bonheur avait élu domicile en ces lieux.

[Jacques Delfosse]

Qu'est devenu Tagada ?

Je l'ai connu dans les débuts de la BKS... il nous accompagnait souvent et était devenu un de nos premiers membres, à l'invitation de René.

[brindacier]

Voici deux photos de l'atelier de Jean que j'ai retrouvées.

Jean dans la partie de l'atelier dédiée au travail du bois

l'atelier de Jean vers 1998

Il y a deux ans, Takada était toujours au moulin, assis à la même place depuis une bonne quinzaine d'années. Si personne ne l'a déplacé, il doit toujours y être...

[doncuistorel]

bonjour,

je m'appelle Aurélien et je suis très ému de voir vos messages concernant celui que vous appelez "maître Jean", pour moi c'est oncle Jean, le frère de ma grand-mère. C'est un grand monsieur, qui malheureusement n'a plus toutes ses facultés mentales (bien qu'il continue à lire énormément) depuis qu'il a été agressé par des jeunes cambrioleurs il y a 2 ans au moulin. Du haut de ses 90 ans, il a frappé le premier agresseur, puis s'est fait tabasser pour les 50 euros de son portefeuille.
Par contre, je confirme les histoires racontées ici et qui m'ont été contée maintes fois, mais sachez que ce n'était pas un faussaire, les pistolets furent sa seule "arnaque", mais pas pour l'argent, pour l'art uniquement. Je rajouterais également qu'il était le seul en Europe à fabriquer des canons qui tiraient des vrais boulets (qu'il essayait long de la Meuse !).
Si vous voulez une anecdote, quand il était jeune, étant pauvre, il avait peint les meubles sur les murs et vivait avec une chèvre dans sa cuisine !
Tout ça pour vous dire un grand merci de faire son apologie, de perpétuer son œuvre à travers les vôtres et de rendre hommage à l'homme que j'admire le plus.

PS : si vous souhaitez d'autres histoires, souvenirs ou lui passer un message, contactez moi sur mon mail : hellobali@hotmail.com.

[Jacques Delfosse]

Merci de ta réponse qui nous replonge dans le petit monde de Maître Jean.
Ce message me refait penser aussi à René Bol, mon ami et un de ses "élèves" qui est maintenant disparu depuis deux ans.
Je viens de recevoir le dernier couteau qu'il ait fabriqué, une serpette de vigneron (qui me rapelle ma ville natale, Huy, sur la Meuse) et que Sonia Lust, sa veuve a rehaussé d'un double scrimshaw : d'un côté la marque compagnonique de René, de l'autre, ma marque personnelle.
Cela devient un véritable "aide-mémoire" de ce passé de la forge et de la coutellerie que nous avions réuni dans la BKS.
Si tu le veux bien, continue à nous entretenir de Maître Jean et des siens.
À bientôt.

[Metal Connexion]

Madame Seydel a souhaité s'associer à l'hommage rendu à son frère, Jean.
Je viens de recevoir deux photos commentées, accompagnées d'un article.

Je suis particulièrement heureuse de pouvoir apporter mon témoignage à l’hommage rendu à mon frère sur votre site.
Ses multiples talents m’ont toujours émerveillée. Il a été pour moi ce grand frère mystérieux, capable de transformer tant de matières différentes en des objets impressionnants comme des épées, des armures, des canons, mais également des reproductions d’instruments de musique ancienne dont la délicatesse et la fragilité étaient surprenantes.
Il s’est aussi révélé être un fin gourmet : pour satisfaire un de ses caprices, je l’ai amené à Liège où nous avons dégusté ces fameux « rognons de veau à la liégeoise », recette qui, d’après lui, n’est vraiment réussie que dans la Cité Ardente.
Cet aspect de la personnalité de mon frère nous éloigne de l’image qu’on se fait d’un forgeron aux multiples talents, mais il nous montre un homme qui peut aussi apprécier les raffinements d’une certaine gastronomie.

Simone Seydel

Cliquer pour lire l'article.

Merci Madame Seydel, c'est un grand honneur de vous accueillir ici.

[Jacques Delfosse]

Merci Madame Seydel !
Nous maintiendrons la mémoire de Maître Jean et de ses disciples.
Ce ne seront pas que des hommages, mais la poursuite d'une certaine philosophie et de l'art de transmettre ses talents, une volonté que nous partageons.

[lexmark205]

En été 2005 j'ai fait un reportage photo en moyen format sur les métiers en voie de disparition. J'ai entre autres photographié le travail de M. BOL, celui d'un ex-médecin reconverti dans la fabrication de flûtes en ébène et ivoire (Uccle) et enfin M. SEYDEL, connu des 2 premiers. Le monde du haut de gamme est très petit...
Il y a 15 jours, un chef d'entreprise reconnait Jean sur une des photos de mon living (!). Incroyable car c'est avant tout le travail de l'artiste qui domine l'image.
Au même moment, une dame me demande les coordonnées du "flûtiste" et voilà que je tombe sur ce site. Le hasard n'existe pas, je le confirme.

En attendant, j'apprends le décès d'un homme brillant et qui avait toute sa tête... et son caractère aussi mais j'avais trouvé la faille : l'humour et les objectifs photo (film). Il n'y pas beaucoup de gens qui m'aient impressionné dans ma vie, monsieur Jean en fait partie. J'avais trouvé génial que le dernier voyage du génie se rapprochant davantage qu'il ne s'en éloignait, 2 prof d'Anderlecht venaient lui extraire un maximum de savoir 1-2 semaine car l'artiste n'avait pas seulement de l'or dans les mains, c'était une encyclopédie à lui tout seul.
Je lui avais offert 2 ou 3 tirages barytés, travaillés avec le plus grand soin. Fallait pas décevoir le maître!

Ce qui n'était pas prévisble en revanche, c'est la disparition de M. BOL, un gros nounours d'une tendresse insoupçonnée et un echte brusselair. Il m'avait emmené dans son antre à Ittre par là. J'y avais fait une photo dans la pénombre et la lui avais offert.

Si de là-haut vous me voyez, c'est pour vous que je rédige ce petit hommage posthume. Merci pour les bons moments que vous m'avez offerts. J'espère que derrière les nuages, vous vous racontez de belles histoires et que vous les partagez avec vos nouveaux compagnons...

Jean-Claude
Uccle

[Jacques Delfosse]

C'est avec émotion que je lis votre intervention à propos de Maître Jean, mais aussi à propos de mon cher et regretté ami René Bol.
Nous étions très proches et avions fondé ensembles la BKS, cette association désormais bien connue d'amateurs (au sens le plus noble) et de professionnels de la coutellerie.
C'est une grande perte pour notre ASBL et son décès me laisse une plaie au coeur...
Sa présence réconfortante, sa sagesse et sa bonhommie me manqueront toujours.
La photo dont vous parlez, est-ce celle à "La Forge du Bonheur" ?

Amicalement,
Jacques