Poignard persan pesh-kabz

[BDelor]

Le pesh-kabz est une arme que l'on trouve sous diverses déclinaisons en Afghanistan, Perse, et Inde. La lame, puissante, destinée à supporter des efforts violents est doublement renforcée : d'abord une section en T avec un dos de lame élargi, puis une pointe sur-épaissie à 4 pans.
La base de la lame est très souvent ornée de gravures, notamment sur les armes persanes et mogholes dont les ornementations sont parmi les plus belles.

J'avais fait ce pesh-kabz il y a déjà quelques années, mais comme je viens tout juste de faire une séance photo, je vous le montre maintenant. La lame est forgée en acier carbone, la poignée est en corne de buffle avec un cache joint sculpté et doré à l'or fin. La gravure de la lame a été confiée à Yann Le Baillif (MOF).

[lamoksha]

C'est un magnifique ouvrage, comme à ton habitude !
Pourrions-nous avoir les cotes de la lame, et quelques précisions sur la facture du fourreau s'il te plaît ?
En outre, est-ce que l'emploi de la corne de buffle est traditionnel sur le pesh-kabz, ou un effet de couleur est-il recherché ici ?

[BDelor]

Merci !
La lame fait 30 cm, et la longueur totale est de 45 cm.
Traditionnellement, les poignées de pesh-kabz sont en ivoire de morse, ou plus rarement en corne de rhinocéros. L'utilisation de l'une et l'autre matière n'étant plus possible de nos jours, je me suis rabattu sur le buffle. Ceci dit, ce n'est pas un choix complètement exotique, il existe des exemples d'utilisation traditionnelle du buffle, par exemple sur les yatagans de la Mer Noire...
Comme je ne maîtrise pas la ciselure (c'est une carence qu'il va décidément falloir combler..), j'ai fait le fourreau d'une manière plus moderne : moulage d'un mastic autour de la lame, sculpture des motifs sur le mastic, puis métallisation électrochimique. La partie centrale de l'étui est recouverte de cuir noir.

[AchimW]

Très beau travail, Bernard. Et je pense que le buffle noir lui va bien.

Mais pourquoi tu dis que l'utilisation de l'ivoire de morse n'est plus possible de nos jours? Avec les propres papiers (CITES) je ne vois pas de problème et il y a des revendeurs avec des dents légales dans quasiment toutes les grands salons de coutellerie.

Pour le rhino, c'est vrai que c'est extrèmement rare en légale. Mais j'en ai eu dans les mains et comparé a un morceau de corne de buffle brun (pas noir) je dis que c'est très diffiçile a voir la différence.

[BDelor]

Merci Achim.

C'est vrai qu'il est encore possible d'acheter de l'ivoire de morse officielle CITES (par contre je ne sais pas s'il faut comme pour l'ivoire d'éléphant, faire une demande pour être autorisé à le travailler). Ce qui par contre est - à mon avis - rédhibitoire, ce sont les éventuels problèmes douaniers qui peuvent en découler à partir du moment où l'on veut faire sortir son travail du territoire.
Je m'étais renseigné, l'année dernière, pour savoir s'il serait possible d'envoyer aux États-Unis une pièce avec une poignée en ivoire de morse. J'ai consulté tout le monde, CITES, douanes US, consulat, je n'ai jamais eu une réponse ferme, juste un "ça devrait passer, mais c'est pas sûr...". C'est dommage, parce que le rendu de l'ivoire de morse est inimitable, avec cette démarcation entre la couche périphérique homogène et la partie centrale cristallisée si reconnaissable. Pour autant, vu le genre de pièce sur lesquelles on l'utilise, il n'est pas possible de courir le risque d'une confiscation en douane.

Pour ce qui est du rhinocéros, je pense que l'interdiction est totale. De toute façon je n'en ai jamais eu entre les mains. Et en plus, comme tu le dis, la matière par elle-même n'a rien de particulier, elle ne présente pas d'intérêt esthétique. Elle est très fibreuse, c'est de la corne, et pas d'une finesse particulière. Autant utiliser de la corne de vache ou de buffle.

[forgeferron]

Tout comme le sabre Yatagan, cette véritable oeuvre d'art frise la perfection !
Tant de matière première, de temps, d'énergie, de passion et de maitrise technique pour obtenir une arme d'une telle beauté...

Mes plus sincères compliments monsieur Delor, pour cette arme redoutable, qui, si je ne m'abuse, figure dans l'excellent ouvrage "les couteaux, de la lame à l'identité" de Thibault Rémusat, dans lequel on peut également vous voir en action à l'enclume, ainsi que d'autres œuvres de votre part, comme une splendide flissa ?

[BDelor]

Merci, effectivement ce pesh-kabz est visible dans le livre de Thibault Rémusat, qui fait un tour d'horizon très intéressant des différentes armes orientales.

[Shimegi]

C'est un superbe travail.
Est-il possible d'avoir une vue de dessus au niveau du manche ?

[BDelor]

Merci !
Voilà une photo du dessus.

[Shimegi]

Merci.
Le dos est superbe également. L'élément doré a-t-il été gravé ? La profondeur laisse penser à un élément découpé et rapporté.

Il y a sur cette photo une grande différence dans la finition entre le manche et le fourreau. On dirait que le fourreau sur cette image est fait dans un alliage mou du type zamak, impression que je n'avais pas sur la première photo. L'éclairage et le contraste avec le fond doivent en être à l'origine. Comment est fait le fourreau ?
J'aimerais voir ça en vrai.