Bonjour Xavier,
En fait ce n'est pas vraiment un traitement de recuit qu'il faut faire.
Je m'explique : la lame de scie à ruban emploie un acier dur pour garder un pouvoir de coupe élevé.
Comme il faut bien "boucler" le ruban, il faut nécessairement la souder.
Pour ce faire, vu l'épaisseur, si tu emploie une électrode enrobée tu auras un résultat pas terrible, le risque est grand de mal fusionner les bords, et surtout d'apporter un acier inadapté au métal de base.
Les postes MiG-MaG font des projections et surtout des collages. Là encore, avoir l'acier adapté n'est pas aisé.
Le mieux, c'est d'employer un poste TiG, sans métal d'apport avec jeu nul entre les rives.
La soudeuse par conduction électrique décrite par Baptor ne me dit absolument rien, ce pourrait être une soudeuse par résistance par point, mais pour souder de cette manière il faut travailler par recouvrement de matière.
Or, une lame de scie à ruban ne peut être superposée sur elle-même, il y aurait une variation locale de l'épaisseur du ruban, ainsi qu'une variation locale mais néfaste du rayon de cintrage atteignable sans rupture... or, on ne peut pas souder par résistance une matière agencée en "bout à bout", sauf par moletage ou par étincelage et c'est une machine très, très rare et très spécifique pour une dimension d'assemblage donné.
Mystère pour cette machine de soudage, donc.
Dans tout les cas, il te faut "entourer" les bords à souder avec des coupons sur lesquels tu vas amorçer ton arc, et sur lequel tu vas finir ta soudure. Ces "martyrs" te permettront de ne pas avoir d'amorces de rupture suite à une morsure de l'arc sur le dos ou sur le tranchant de ta lame, un tel défaut n'est pas admissible.
D'un autre côté, le refroidissement de la lame est très rapide lors du soudage. A tel point qu'en fait tu réalises sans le vouloir deux trempes de part et d'autres de la zone fondue du cordon.
Le résultat est que, quand la lame casse, tu vois ton cordon de soudure qui a pété "pile" à la jonction métal fondu / métal de base. C'est là où les duretés dites "sous cordon" sont les plus élevées de l'assemblage soudé.
En fait, ce n'est pas un recuit qu'il faut faire, ici "grossir les grains" de l'acier ne sert strictement à rien. Dans l'absolu, il faut retransformer ces structures de trempe en austénite (vers 900 - 950°C)
et laisser refroidir le plus lentement possible.
Ce qu'il faut faire (différemment) pour éviter cette opération qui engendre du voile, c'est de ralentir au maximum la vitesse de refroidissement du cordon de soudure. La solution, c'est de le préchauffer énergiquement AVANT soudage. Tu peux préchauffer à 500°C, vu la finesse du ruban, tu mets toutes les chances de ton côté : cet acier se refroidit vite au vu de sa finesse, en plus l'acier est plutôt un bon conducteur de la chaleur !
Ce que je te recommande, c'est :
- de toujours souder sur une lame parfaitement polie et dégraissée préalablement à l'acétone,
- de garder des morceaux de lames, pour en faire des martyrs,
- de garder des morceaux de lame, pour t'exercer à les souder (TiG très recommandable là-dessus !),
- de garder des morceaux de lames, que tu as soudé sans préchauffage, puis un deuxième préchauffé à 200°C issu de la même lame, et un troisième préchauffé à 300°C, toujours issu de la même lame, et de conserver un quatrième à 400°C et un cinquième coupon à 500°C de préchauffe, coupons toujours issus du même ruban.
Chaque coupon doit être soudé dans les mêmes conditions : même gaz, mêmes réglages, même poste, même opérateur qui soude tout d'une traite.
- dans la mesure du possible, de souder d'abord sur l'endroit, puis très vite sur l'envers, de manière à supprimer les défauts de pénétration.
L'astuce ultime, c'est de polir après soudage les 5 / 6 coupons avec un même grain très fin (600 suffit, 1200 c'est très bien) et tu appliques quelques gouttes de perchlorure de fer, mélangé à de l'alcool à 90° (un pour 5 volumes d'alcool).
A partir de là, tu verras ta soudure invisible une fois polie se matérialiser sous l'action du perchlorure. S'il y a des défauts du type collage, tu les verras facilement,
mais surtout, juste à côté du cordon (la zone fondue hein !),
tu verras (ou pas)
une frondaison noire. Cette frondaison est la signature optique de structures de trempe contenant des carbures de fer Fe3C, typiquement martensitique et donc très fragiles, qui ont été révélés par le perchlorure...
Ou comment évaluer la dureté sans avoir de machine à tester la dureté !
Voilà un bel exemple :
A droite, un acier très doux, qui a un peu réagi à la soudure, sur la zone affectée thermiquement. A gauche, un acier très dur, du genre un 25CrMo4 ou un 90MnCrV8.
Pour info, dans l'industrie on aime pas du tout dépasser les 380 HV10 sous cordon (dixit EuroNorm), dans mon domaine on s'interdit de dépasser 325 HV10. Ici, on est très dur et trop fragile, l'assemblage est dangereux car imprévisible : 436 HV10 c'est énorme, ici l'acier va casser en service comme du verre.
On notera que la frondaison est proche de la surface qui a été soudée en dernier : en soudant près de la "peau" extérieure, la dernière passe de soudage a fait diminuer les duretés sous cordon des cordons antérieurs (enfin, on ne gagne que 10 Vickers ici !) ...sauf pour elle-même.
On notera aussi que la première passe de jonction "la pénétration" est elle aussi dure : on ne peut pas mettre beaucoup d'énergie sinon on effondre le bain de fusion !
Voilà pourquoi il faut toujours préférer souder de part et d'autres du ruban, pour ton cas notamment.- On améliore la déformation résiduelle après soudage (gauchissement de la lame, très mauvais lorsque la zone sera cintrée sous le galet),
- et on calme les duretés sous cordon.
Souder des deux côtés un ruban de lame de scie doit permettre de s'affranchir d'un préchauffage ET d'un traitement thermique d'adoucissement, si le préchauffage a été laissé de côté ou de température de consigne trop faible.
Attention, pour certaines lames très dures il faut combiner en plus des deux passes "recto-verso" un préchauffage qui va bien, VOIRE un traitement d'adoucissement en complément.
Si tu as bien identifié (par rayures) tes 5 ou 6 coupons, tu verras que soudé "'à l'ambiante" tu as des structures de trempe, et que passé une certaine température de préchauffage la frondaison a disparu et les zones adjacentes du cordon sont -presque- de la même couleur que l'acier du ruban qui n'a pas pu réagir thermiquement (car trop éloigné de l'assemblage pour être concerné par la soudure).
C'est à partir de là que tu pourras déduire ta température critique de préchauffage qu'il te faut a minima respecter pour les autres fois.
A condition de ne pas changer de fournisseur de lames entretemps ! Si tu changes de chimie de lames tu changes tes paramètres de soudage, il faut repartir de zéro !Plus tu préchauffes, plus tu vas risquer de distordre en permanence ton ruban de scie même refroidi.
Plus tu préchauffes, plus tu auras tendance à effondrer ton bain de fusion.
Plus tu préchauffes, plus tu cours le risque de te brûler les doigts.
Il est donc judicieux de doser la préchauffe pour ne pas maltraiter l'acier, ni dans un sens (trempe), ni dans l'autre (lame trop molle, tordue ou brûlée).
Voilà.
En appliquant ces conseils, tu vas réduire très sensiblement ton budget consacré aux rubans !
Bien à vous tous.