Eh bien merci de m'avoir répondu si diligemment, il est vrai que le terme "prussiate" à titillé ma mémoire pour faire clignoter le voyant interne (c'est le rouge écarlate) : "attention, composé qui craint" !!
Par chez moi dans l'Aisne, on ne connaît que trop bien les saletés de la première guerre mondiale, toujours actives et qui contiennent notamment "un cousin germain" du composé susnommé, le redouté
acide prussique (l'ancêtre du
Zyklon-B de l'Holocauste, qui est "juste" du cyanure d'hydrogène pur, gaz de combat mortel à très faible doses, même les mouches tombent).
A ce que je lis de cette recette, je vois que cette mixture est riche en kératine, ce produit animal est riche en soufre et ce dernier à une action des plus étonnante sur les métaux. Il modifie le sens d'écoulement des cellules de Marangoni, mais ici on ne crée pas de bain de fusion. A mon avis le soufre joue ici le rôle de "facilitateur de la pénétration de carbonitrures".
Le soufre (corne de pied de bœuf) est comme l'oxygène un puissant
chalcogène. Employer du soufre doit permettre d'isoler l'action de l'oxygène et de l'azote atmosphérique. On doit donc avoir une pâte assez épaisse (sel marin décrépité) riche en tanins (qui contiennent des molécules du genre cycles benzéniques complexes avec fonctions hydroxydes à tout les étages, donc fortement basiques), le nitrate de potasse apporte encore de l'azote, la potasse KOH ne fait qu'apporter la mariée ici (mais reste basique comme les tanins); le savon vert doit servir de liant : même chaud, il prend la consistance d'une cire, plutôt neutre chimiquement si le savon est "actuel", l'ancien est basique car un savon vert de Marseille contient entre autres des huiles végétales, de la cendre (phosphates), de la soude NaOH et mélangée à du sel NaCl).
Le prussiate semble être le cœur actif de cette drôle de tambouille infâme : le cyanure, qui est juste une fonction comprenant l'anion CN-, est formé d'un atome de carbone (moins) lié par une liaison triple à un atome d'azote. Le proton (hydrogène H+) équilibre la charge de l'ensemble, d'où le nom de cyanure d'hydrogène.
Paradoxalement, je suis allé voir ce qu'il en est, et les composés
ferrocyanures (ou hexacyanoferrates II) Fe(CN)
6 4- sont pratiquement inoffensifs pour le vivant. On les emploie comme additifs alimentaires !
Ce sont les additifs E 538, E 535 et E 536, qui sont des anti-agglomérants,
notamment employés pour le sel de cuisine et dans l'élaboration des vins rouges et blancs, ils servent pour faire précipiter le fer et le cuivre contenus dans les cuves, après les traitements à la bouillie bordelaise !
Le plus amusant, c'est que le ferrocyanure de potassium est considéré par le RepTox comme dangereux s'il est chauffé à plus de 70°C ou mis en contact avec des acides, où un dégagement de cyanure d'hydrogène mortel est à craindre...Une fois bien chaud, le mélange "largue" dans l'acier du carbone déjà lié à de l'azote (c'est notre fonction cyanure, très toxique), plus de l'azote apporté avec le nitrate de potasse. L'hydrogène autrefois lié au cyanure ainsi que son cation le potassium peuvent tranquillement réagir avec les fonctions hydroxydes du savon et des tanins.
Mais si on vient à entrer en contact avec les vapeurs de cyanure qui ont réagi en excès et pas avec l'acier à traiter, on peut mourir par le mécanisme suivant : par contact cutané, respiratoire ou par ingestion, une concentration de 300 ppm (300 parties par million, soit 0.003% en masse) est suffisante pour tuer quelqu'un en quelques minutes.
En France, l'arrêté du 4 Novembre 1975 modifié impose que la masse des matériaux inflammables utilisés dans les aménagements intérieurs n'entraîne pas une quantité d'azote pouvant être libérée sous forme d'acide cyanhydrique, supérieure à 5 grammes par m3 du volume du local considéré.
J'ai pu lire que le seuil de sensibilité olfactive (
mais tout le monde ne le détecte pas) apparaît dès 0,814 ppm.
Le cyanure est réputé pour avoir une odeur d'amande amère.La bonne nouvelle d'après le RepTox (Québec), c'est que le cyanure d'hydrogène mortel reste extrêmement inflammable et brûle spontanément à partir de 540°C.
D'où la mesure de sécurité de bon sens qui doit consister en un "arrosage généreux" de la flamme, le temps que la cémentation se fasse, de cette manière on limitera la production d'HCN à la source...
Ils recommandent en outre l'usage d'un appareil de protection respiratoire à production d'air autonome, à partir du moment où la concentration dépasse 47 ppm par m3 d'air... ainsi qu'une combinaison étanche.
RepTox a écrit:Effets aigus Mise à jour : 1989-05-15
Irritation possible de la peau, des yeux et des muqueuses; asphyxie chimique: maux de tête, confusion, faiblesse, vertiges, nausées, vomissements, respiration rapide, tremblements, anxiété, palpitations, possibilité de troubles visuels, sensation d'oppression, rougeur de la peau, perte de conscience, convulsions, paralysie, arrêt respiratoire et mort possibles; exposition à une forte concentration: perte de conscience, arrêt respiratoire et mort rapide.
Mais revenons-en à notre réaction infernale :
Pendant ce temps, le soufre contenu dans la corne, qui contient un peu plus de 15% en masse d'un acide aminé soufré (la kératine, de formule brute C
3H
7NO
2S) se fait le gardien efficace vis-à-vis de l'oxygène atmosphérique, et les corps gras alliés au savon empêchent le mélange de s'écouler de la pièce même brûlante : ces molécules de haut poids moléculaires s'écoulent paresseusement, même avec une chaleur d'enfer en dessous d'elles... comme elles sont riches en carbone, on évite l'oxydation de la pièce, pas de légère décarburation donc.
Plus la température de l'acier est élevée, plus les petits atomes de métalloïdes type carbone et
pnictogènes azote peuvent diffuser rapidement (et donc profondément) dans les mailles cristallines. Ce qui n'est pas le cas des gros atomes de métal, qui eux ont une cinétique de pénétration extrêmement réduite : des ordres de grandeurs de 1 mm par an voire par millénaire.
Bien évidemment à cette température, on est pas encore totalement austénitique, c'est "dommage" car l'austénite peut dissoudre énormément de carbone, contrairement à la ferrite. Mais austénitiser l'acier revient à annuler les traitements thermiques antérieurs. Et à faire grossir les grains, car à cette étape le forgeage, il est fini !
Voilà comment je décrirai l'action de cette pâte. A mon avis, en plus d'un masque à gaz, mieux vaut aussi employer des gants étanches pour produits chimiques agressifs, car le cyanure aime bien réagir au travers de la peau.
Voilà ce qui est dit en termes de secours :
RepTox a écrit:Premiers secours 17 Mise à jour : 2010-04-09
Inhalation
En cas d'intoxication, donner de l'oxygène et transférer immédiatement la personne au service médical d'urgence le plus près.
Contact avec les yeux
Rincer abondamment les yeux avec de l'eau pendant 5 minutes ou jusqu'à ce que le produit soit éliminé. Si l'irritation persiste, consulter un médecin.
Contact avec la peau
Retirer rapidement les vêtements contaminés en utilisant des gants appropriés. Rincer abondamment la peau avec de l'eau. Consulter un médecin.
Ingestion
En cas d'ingestion, rincer la bouche avec de l'eau. Faire boire un verre d'eau puis faire vomir la personne si elle est consciente. Consulter un médecin. Ne jamais administrer quoi que ce soit par la bouche à une personne inconsciente ou qui a des convulsions. Si possible, deux personnes doivent intervenir.
Note
Le cyanure est un contaminant extrêmement dangereux. Pour intervenir auprès d'une victime intoxiquée par ce produit, le secouriste doit avoir reçu une formation complémentaire telle que décrite dans le manuel Secourisme en milieu de travail de la CSST (Commission sur la santé et la sécurité du travail).
A noter que c'est le foie qui métabolise le cyanure pour former des
thiocyanates : mélange de soufre (préfixe "
thio-" et de
cyanates, pour la fonction chimique "OCN", ce qui donne une fonction "SCN"... à condition que l'exposition au cyanure ne soit pas trop lourde, sinon le foie (et le reste) meurt tout court !
Une digression qui n'en est pas une :>>> A noter que les fruits et légumes peuvent contenir du cyanure d'hydrogène : les amandes, les noyaux de pêche et tout les fruits du genre Prunus (ce qui fait du monde), mais surtout ...le manioc, qui doit être épluché, broyé et mis à fermenter pendant 24 à 48 heures, ce processus réduit la quantité d'HCN naturellement présente. Il est ensuite lavé, séché à l'air et cuit quelques minutes à la vapeur avant emballage et consommation. Cette spécialité culinaire ivoirienne d'Attiéké est renommée et c'est un bon exemple de la suppression de la toxicité du cyanure "alimentaire".
Mal préparer du manioc laisse de mauvais souvenirs ...car consommer des feuilles mal cuites de cette Euphorbiacée est ...mortel !
Une petite digression sur la nitruration :Un de mes anciens professeurs de technologie industrielle nous avait raconté en classe que l'on pouvait nitrurer des aciers en les trempant à chaud dans ...de la pisse, qui contient de l'urée et donc de l'azote.
Personnellement, je tenterai bien une attaque à chaud d'un bloc de titane pur du genre T40, chauffé correctement sous argon (vers 550 - 650°C par là), puis d'inonder brusquement la chambre inerte de chauffe par ...de l'azote pur.
On devrait obtenir ainsi des nitrures de titane extrêmement durs, et en plus ils ont une magnifique couleur dorée !
Une remarque par rapport aux appareils de mesure de la dureté et leur prix :Il est possible de surveiller et d'obtenir à de très bons prix les équipements de laboratoires d'essais, qui sont réformés.
Ces laboratoires se livrant concurrence acharnée, il est nécessaire de rééquiper la dotation pour rester dans la course tarifaire !
Peut-être que Roseleur pourrait nous éclairer sur le maniement du cyanure, en effet pour les dorures il est employé pour former un amalgame de l'or, substitut toujours mortel au redoutable mercure...
Bien à toi et merci pour tes sources !
Mieux vaut cémenter dehors et masqué/protégé !
Pas évident la coutellerie !