Attention : La réalisation d'un couteau piémontais nécessite l'utilisation d'outils tant manuels qu’électroportatifs, susceptibles de causer des blessures sérieuses. Vous êtes donc invités à la plus grande précaution et à vous enquérir de leurs modes de fonctionnement en vous rapportant aux notices constructeurs.
Vous aurez également à manipuler une source de chaleur afin de réaliser le traitement thermique. Je vous invite à prendre toutes les précautions nécessaires pour ne pas blesser votre entourage ou vous même. Isolez vous, et prévenez les personnes alentour que vous allez manipuler des outils éventuellement dangereux.
Je vous invite également à porter gants, masques et lunettes. Vous ressemblerez peut-être à un extraterrestre, mais cela vous évitera d’éventuels désagréments.
L’auteur de ce texte ne peut en aucun cas être tenu pour responsable des éventuels incidents qui surviendraient lors de la réalisation de ce tutoriel.
Matériel nécessaire :
- 1 dremel avec tambour de ponçage, feutre de polissage, pâte à polir, disque de coupe...
- 1 lime à métaux agressive ;
- 1 marteau (pour riveter) ;
- 1 pointeau et une pointe à tracer ;
- 1 scie à métaux ;
- 1 perceuse (de préférence à colonne), 1 foret de 2mm et 1 de 3 mm HSS (les moins chers des magasins de bricolage sont parfaits) ;
- Des papiers de verre du grain 40 au grain le plus fin possible et une cale à poncer (qui peut être remplacée par un morceau de pneu, un morceau de bois, une lime douce le tout en enroulant le papier autour) ;
- 1 source de chaleur (chalumeau mono-gaz ou lampe à souder bi-gaz) afin de réaliser toutes les opérations de traitement thermique ;
- éventuellement une ponceuse à bande.
Matières
- 1 lime à métaux de marque Nicholson, Talabot ou une vieille lime rouillée en bon acier (8,5 € ou 0,10 € en brocante) ;
- 1 rivet en acier de 3 mm à mater ou un clou en acier doux de 3mm (0,10€ l'un) ;
- 1 goupille élastique de 2 mm ou un clou en acier doux de 2,1 mm (0,15 cm l'une) ;
- 2 rondelles étroites de laiton de 3mm (2 € les 50) ;
- 1 pièce de bois de 3 ou 5 mm d'épaisseur, 2 cm de hauteur et 2,5 fois la taille de la lame en longueur (gratuit) ;
- 1 pièce de bois de l'épaisseur de la lame et d'une longueur approximative de la moitié de la lame (gratuit) ;
- 1 litre d'huile la moins chère possible (0,60€) ;
- éventuellement un bidon d'acide sulfurique de batterie pour moto, solution à 38% (1,65 € le litre).
Détrempez la lame au chalumeau. Chauffez la lame au rouge (jusqu’à ce qu'elle ne soit plus magnétique) et laissez refroidir doucement jusqu'à obtention de la température ambiante.
Découpez la forme à la scie à métaux ou la disqueuse (disque le plus fin possible, genre 1,65mm). A la disqueuse, attention à ne pas trop chauffer l'acier.
Percez l'arrière de la lame : c'est là que la tige de la lentille viendra prendre sa place : ici, un trou de 2mm pour une goupille élastique. Laissez 1 mm de marge par rapport au dos de la lame.
Mise en forme de la lentille et perçage du pivot : le pivot se trouve dans le tiers inférieur de la lame.
On réalise un perçage de 3mm pour recevoir un pivot acier de 3mm. L'arrondi arrière qui correspond à la lentille est réalisé à l'aide d'un tambour de ponçage gros grain monté sur une dremel. La pointe est mise en forme de la même manière. Il est cependant possible de faire ces mises en forme à l'aide de limes à métaux et de cales à poncer avec des papiers abrasifs. Le travail est simplement beaucoup plus long et fastidieux.
A la lime, marquez le ricasso sur 2-3 mm de profondeur à à peu prés 1 cm du pivot.
Réalisation de l'émouture de la lame à la lime la plus abrasive que vous avez. Ensuite, utilisez du papier de verre sur cale à poncer du grain 40 au grain 120 par des passes allant du talon vers la pointe ; la lame étant maintenue dans un étau. De cette manière, vous obtiendrez une émouture parfaitement plate. Faites bien attention d'avoir une émouture symétrique par rapport au fil de la lame. Esthétiquement ce n'est que plus agréable.
Trempe sélective au chalumeau : ici une gangue d'argile verte est couplée à du charbon de bois et du sable.
On chauffe au rouge cerise dans un endroit sombre (jusqu’à ce que l'acier deviennent amagnétique) et trempe dans l'huile chauffée à 60°. Afin de voir si la trempe a pris, vous devez passer une lime à métaux sur le fil de la lame. Si la lime glisse sans mordre, c'est que l'acier a obtenu au moins la dureté de la lime. Par conséquent la trempe a pris. Par contre si la lime mord un tant soit peu, recommencez le processus de normalisation et de trempe. Le but est d'obtenir la dureté maximale de l'acier par l'opération de trempe. L'ajustage de dureté se fera par l'intermédiaire du revenu.
(Avant de réaliser la trempe vous pouvez réaliser deux ou trois normalisations afin de réduire le grain de l'acier qui a pu éventuellement augmenter lors de la détrempe ainsi que lors du travail de la lame (disqueuse, dremel...) Pour cela, chauffez la lame à température d'austénisation (lorsque la lame devient amagnétique) et laissez la refroidir doucement. Recommencez l'opération. Après cela, vous pouvez réaliser l'opération de trempe.)
Revenu dans le four de la cuisine à 200° pendant 1 heure.
Le revenu a pour objectif de détendre les tensions particulièrement importantes qui ont eu lieu dans la structure de l'acier. Le but est alors de réduire le stress accumulé dans l'acier lors de l'opération de trempe lorsque les molécules de carbone se sont trouvées emprisonnées dans le réseau cristallin. Cette opération a pour résultat de diminuer la dureté de l'acier et par conséquent de le rendre moins cassant.
Préparation des plaquettes : marquez sur une planche de 3-5 mm d'épaisseur la forme de votre future plaquette.
Fixez sur l'établi le bois, et coupez la plaquette à la scie (en laissant de la marge pour retravailler) :
Les deux plaquettes sont coupées grossièrement. Ici on voit une troisième pièce qui va donner l'épaisseur au couteau ; cette pièce fait exactement l'épaisseur de la lame :
Voici la lame après nettoyage, polissage et révélation de la ligne de trempe à l'acide.
Afin de polir la lame vous devez utiliser des papiers de verres de granulométries descendantes. Autrement dit, vous devez utiliser des papiers de grains de plus en plus fins... jusqu'au 1200-3000 si vous en trouvez. Vous n'aurez aucune difficulté à trouver des papiers de granulométrie 600 au rayon carrosserie. Vous effectuerez des passages allant du talon vers la pointes en utilisant les papiers abrasif du grain 120 au plus fin à votre disposition jusqu’à ce qu'il n'y plus aucune rayure apparente.
Pour un polissage miroir, il faudra utiliser des feutres de polissage monter sur la dremel. Chargez de pâte à polir le feutre à vitesse lente, et ensuite appliquez à haute vitesse de manière homogène sur la lame la pâte. (Attention : si vous tenez la lame à main nue, l'acier va chauffer... pas suffisamment pour détruire le traitement thermique, mais suffisamment pour vous brûler les doigts).
Le passage dans le bain d'acide n'est utile que si vous avez effectué une trempe sélective - le but étant de révéler la ligne de trempe car l'acier est attaqué plus violemment sur la partie non trempée -, ou si vous souhaitez obtenir une finition gris satiné.
Attention : l'usage d'acide est particulièrement dangereux. Il faut porter gants, masques, lunettes de protection et le manipuler avec la plus grande prudence.
Percez le trou de 3mm pour le pivot. Faites pivoter la lame sur la plaquette, histoire de visualiser comment elle va évoluer et se placer dans le manche.
Percez le spacer de deux trous (ici 3mm pour des rivets en cuivre) et percez la plaquette en vous servant des trous des spacers pour guide. Percez le premier trou sur la plaquette, mettez le spacer avec un rivet qui passe par ce même trou et percez le second trou au travers du spacer. De cette manière, vous aurez simplement le même écartement. Faites la même chose sur l'autre plaquette.
Vous retouchez ensuite le spacer pour que la lame vienne bien se positionner dans le manche. Vous travaillerez à la dremel et au tambour de ponçage.
Le spacer a exactement l'épaisseur de la lame.
C'est un joli petit puzzle. Les pièces ont été retravaillée de façon à être relativement ergonomiques. Et le spacer est parfaitement ajusté pour s'intégrer entre les plaquettes.
Voici le couteau pré-monté :
Enfilez la goupille dans le trou de lentille. (Elle peut être remplacée par un clou de 2,1 mm mis en force.)
L'agencement du couteau permet de visualiser le positionnement des pièces.
A la lime, travaillez le "tang cup" où la tige de la lentille viendra se loger.
Ensuite retouchez la goupille de manière à ce qu'elle ne dépasse absolument pas.
Avant le rivetage, vous adoucirez l'ensemble des plaquettes. La pièce sera maintenue dans un étau. - j'utilise un morceau de lino pour éviter de marquer le bois - et à l'aide de papier de verre 120, j'utilise la manière du cireur de chaussures, histoire d'arrondir nettement les plaquettes...
Voici le puzzle complet : le rivet est coupé, les deux rondelles sont de simples rondelles de laiton du commerce.
Le rivet est coupé selon la formule suivante : Épaisseur de la lame + épaisseur des deux Branches + épaisseur des 2 rondelles + 2*1/2 du diamètre du rivet,
soit ici : 4mm. + 2*3mm. + 2* 0,7mm. + 2* 1/2 de 3mm. = 1,45 cm.
Rivetez l'ensemble délicatement ; les rivets arrière en premier.
Pour le rivetage, frappez avec un marteau léger toujours à 45° de manière à ne pas écraser le rivet. Le but est de le 'champignonner' sans l'écraser ou le tordre. Si vous avez un marteau boule, c'est encore mieux. Ensuite vous pouvez "nettoyer" le travail à l'aide d'une petite meule sur la dremel. Puis vous polissez à l'aide des feutres dremel et de la pâte à polir. Avant, vous pouvez adoucir avec du papier de verre 320 ou plus :
Un petit bain de 24-48h dans l'huile de lin permet de bien imprégner le bois :